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Souvenirs forestiers

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Haku


Haku
Haku

Originaire depuis le : 19/09/2016
Récits contés : 170

RPG
Âge : 18
Groupe: Anemös
Inventaire: Un arc, des flèches, un couteau de chasseur, un appeau à raton-laveur, un ruban protecteur, un maillot anti-chaleur, un papier magique et une petite renatsu

MessageSujet: Souvenirs forestiers   Souvenirs forestiers EmptyJeu 29 Sep - 12:01

Archer
Un sifflement dans les airs se fait entendre, Haku, jeune hybrid de quatorze ans, lève les yeux au ciel, il n’y a rien. Assis sur une souche, il reprend tranquillement son observation appliquée des écureuils en train d’escalader les arbres sous la lumière déclinante. C’est ainsi que le trouve Izumi, elle l’a déjà vu au village plusieurs fois, surtout à des heures indues. Elle passe sans le saluer, trop loin et trop préoccupée qu’elle est. Elle s’enfonce dans les fourrés sans savoir qu’une paire d’yeux jaunes la regardent s’éloigner. Il la détaille, voyant ses marquages sur les bras et la nuque malgré le soleil couchant.

Les rongeurs acrobates ont changé d’arbre lorsque Haku détourne le regard de l’hybrid musclée aux cheveux noirs. Il se demande avec un certain détachement ce qu’elle peut bien avoir perdu – car pour quelle autre raison irait-elle fouiller les bois ? – puis si c’était lié au sifflement étrange de toute à l’heure. Haku aimait les écureuils mais ils ne reviennent pas ; il va devoir changer de poste. Les pas d’une personne se rapprochent, l’hybrid de tout à l’heure suppose Haku avant d’en avoir confirmation.

- Dis-moi, gamin, tu fais quelque chose ? Tu veux bien m’aider ? Mon élève a lancé une bonne flèche dans la mauvaise direction et j’aimerai la retrouver avant la nuit.
-  Oh oui !
s’exclame Haku, ravi de rendre service.
Le mystère levé sur le sifflement, le jeune hybrid s’élance vers un arbre fait pour l’escalade et grimpe, aussi agile que les écureuils de tout à l’heure.
- Appelle-moi si tu vois un truc ! Elle a des plumes noires !
- Hum-hum !


Izumi, le front soucieux, repart d’un autre côté tandis que Haku balaye la zone du regard, excité à l’idée d’être le premier à trouver l’objet. Il passe un long moment à scruter ce qui pourrait ressembler à un bâton fiché dans le bois ou posé sur le sol. Ayant le sentiment d’avoir fait le tour, il change d’arbre et tandis qu’il entame son ascension, une tache noir plus sombre que les ombres attire son attention. Il glisse, va sur les lieux. Il ne lui faut pas longtemps pour repérer ce qui l’a interpellé. Ce sont des plumes noires entre les branches. Il extirpe la flèche sans mal. Faisant tourner le trait entre ses doigts, il l’admire, détaille la tête et arrange sur les plumes.

- Je l’ai !
- Fiou ! Tu as l’œil
, dit Izumi en revenant vers Haku. Ouah, tes yeux ! dit-elle en écarquillant les siens.

Les pupilles de Haku sont dilatées comme ceux d’un chat dans la pénombre. Izumi qui approche pour la première fois vraiment le jeune Hybrid, a cru voir le reflet d'esprits dans le regard du jeune adolescent. Ce dernier, perturbé par l’exclamation de son aînée, perd son sourire et recule.

- Désolée, c’est très bien ce que tu as fait, dit Izumi pour se rattraper. L’enthousiasme du jeune lui plaisait et elle s’en veut de l’avoir vexé sans faire exprès. Haku semble vouloir cacher son regard à présent.
- Merci. C’est une flèche que j’enchante alors je n’aime pas les gaspiller, continue-t-elle pour détendre l'atmosphère.

Le jeune anemös regarde la flèche en détail, comme si en l’évoquant l’enchantement était visible.

- Qu’est-ce que l’enchantement fait ?
- Elle immobile l’être vivant qu’elle touche. C’est non létale mais très pratique. Mais nous devrions rentrer, il fait presque complètement nuit.
- Je vous raccompagne alors
, dit le jeune avec effronterie.

Tout en marchant, Izumi réalise alors que comme à l’instant, son interlocuteur ne semble pas gêné par la pénombre. Doucement, elle le laisse mener la marche pour vérifier si c’est bien ce qu’elle pense bien que cela n’aille pas avec sa supériorité évidente d’aînée. Elle se rappelle qu’elle ne connaît pas son nom.

- Je me nomme Izumi Abe, et toi ?
- Haku Yasu.
- Qu’est-ce que tu veux faire plus tard ?
- Éclaireur,
répond Haku sans hésitation. Il y réfléchit depuis des années.
- C’est fou comment on passe à côté des autres sans connaître leur projet, commente Izumi.
Haku hausse les épaules.
- Et vous, qu’est-ce que vous voulez faire plus tard ?
- Moi ? Tu insinues que je devrais changer de métier ? Haha ! Archer, puisque chasseur n’est pas de mon ressort.


Sous la lumière des deux lunes, Haku remarque la couleur des marques qui recouvrent le corps de l’hybrid. C’est du vert, rougeâtre par endroit. Il s’agit d’une phytos. Le visage de Haku marque sa perplexité.

- Pourquoi être archer si ce n’est pas pour chasser ?
- Je mange de la viande moi aussi. Mon totem est le tue-mouche. Tout talent doit être employé pour servir le village, ne crois-tu pas ? Sais-tu te débrouiller avec une arme de défense ? Ça m’inquiète de savoir qu’un fils de Mère Nature vadrouille seul en bordure du village


Haku ne répond pas tout de suite, sa tête glisse vers l’arme d’Izumi et cette dernière comprend qu’il a le regard fixe. En plus de sa bonne vue, c’est un avantage pour bien viser.

- Non… Mais j’aimerai bien.

Il détourne vivement la tête. Izumi sourit largement, il n’ose pas lui demander de lui apprendre l’arc mais c’est flagrant. Il garde toujours la flèche dans sa main, il a oublié de lui donner.
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Haku


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MessageSujet: Re: Souvenirs forestiers   Souvenirs forestiers EmptyMar 1 Nov - 21:31

Marchant en direction du village qui n’est pas loin, le jeune anemös et la grande phytos sont rejoints par un autre garçon. Haku devine vite qu’il s’agit de l’apprenti d’Izumi. Il est plus grand que lui aussi bien en hauteur qu’en âge. Haku le reconnaît pour l’avoir souvent croisé quand ils étaient plus jeunes. Ils n’étaient pas franchement amis, ni bons ennemis. Le léger flottement dans l’attitude de l’autre en le voyant de plus près lui indique que lui aussi l’a reconnu. Haku connaît son nom mais ça ne lui revient pas… Katsuo ou Kazuo. Le dit-individu voit la flèche dans la main de Haku et dis, un peu stressé, à Izumi :

- Oh vous l’avez trouvée, professeur, alors c’est bon ?
- Oui, puisque je l’ai retrouvée, ça va aller. Kazuo, je te présente Haku. Haku, mon élève. Si tu veux, viens demain en fin d’après-midi nous voir.
- Hu-hum,
acquiesce Haku piqué de curiosité.

Après ces présentations brèves, elle lui indique verbalement le lieu de leur entraînement. Il apprendra plus tard qu’ils changent régulièrement de terrain, au bon vouloir du maître. Haku leur fait un signe d’adieu tout en promettant de venir avant le déclin du jour et s’en retourne à l’intérieur de la forêt. Ils se quittent ainsi.

La nuit calme l’apaise Halu et il repense à cette rencontre. Cette Izumi semblait prête à dispenser son savoir, ce qui n’est pas le cas de tous les chasseurs du village qui sont soit trop occupés soit de mauvais pédagogues. Comme la forêt reste dangereuse, il vaut mieux apprendre quelque chose et le moyen le plus simple reste sa famille. Hélas, les parents de Haku, tous les deux experts au couteau, sont aussi de mauvais pédagogues. Ils s’empressaient d’apprendre trop vite à leur progéniture des gestes trop complexes puis s’énervaient parce que ces derniers n’arrivaient pas à suivre le rythme. Il est saugrenu de démarrer son initiation ainsi. Haku a vite abandonné l’idée de suivre leur exemple. Semblablement rebutée, sa sœur s’est initiée au fouet et au lasso mais là non plus Haku n’y a pas trouvé son compte. Plus il y pense plus ça lui semble évident que son arme de prédilection ne peut être qu’une arme à longue distance. Un arc ferait parfaitement l’affaire.

Le lendemain soir, Haku sort de chez lui en espérant qu’Izumi l’attend toujours. Il s’est couché au petit matin et a malencontreusement émergé plus tard que d’habitude. Les cheveux en bataille, il file au rendez-vous, impatient de voir les archers en action et même de s’y initier à son tour. Quand il arrive sur les lieux, il voit Izumi et Kazuo. Ce dernier s’apprête à tirer vers un cible à une trentaine de mètres. La phytos se retourne vers le nouvel arrivant avec un sourire et place son index devant la bouche pour lui intimer de ne pas déconcentrer le jeune élève. Haku s’approche en silence à côté de la phytos, fasciné par le spectacle d’un élève sous la pression de ne pas se rater devant une personne supplémentaire. Kazuo tire trois flèches à la volée, prenant son temps pour viser. Les triplettes se figent dans la cible de paille.

- Bon allons voir ce que ça a donné.
Haku suit en retrait et écoute Izumi commenté la précision de son élève.
- Alors la première c’était celle-là, ensuite tu as bien compensé mais la dernière tu t’es rapproché de la mauvaise car tu n’as pas tenu compte du faiblissement du vent. Haku, tu veux essayer ?
L’interpellé sursaut quand elle s’adresse soudain à lui.
- Quoi ? Si vite ? Je viens à peine d’arriver.
- Et la leçon finit bientôt, le soleil déclinera vite. Allez !
- D’accord.
- Kazuo, veux-tu bien prêter ton arc à Haku ?


L’élève passa son arc avec une espèce d’air supérieur. Haku ne peut s’empêcher de le complimenter pour casser un peu la glace. Même s’ils se moquaient autrefois entre eux, il n’y a pas de raison de continuer à être rivaux.

- C’était impressionnant tout à l’heure. Depuis combien de temps tires-tu à l’arc ?
- … Neuf mois.
- Allez, pour ton premier tir une quinzaine de mètres
, dit Izumi en s’éloignant de la cible à présent dénudée de flèches. Alors… Kazuo explique-lui comment se tenir et tenir son arc.

L’intention d’Izumi est claire : faire travailler son élève en même temps qu’initier Haku. Kazuo n’a que le choix de bien transmettre son savoir ou son maître risque d’intervenir pour le corriger.

- Tu te tiens droit déjà, la jambe droite devant et l’épaule alignée, c’est avec que tu vises. Non, les mains comme ça !

Il tripatouille les doigts de Haku pour leur imposer une bonne position puis pour lui faire saisir une flèche. Haku tend l’arc, la corde oppose plus de résistance qu’il ne l’attendait.

- Et là, je lâche ?
- Non, encore quelques centimètres. Et tiens fermement ton bras gauche quand tu lâcheras.


Haku parvient tant bien que mal à lâcher sa flèche qui finit sur la cible, de travers, un peu plus bas que le centre. Izumi le complimente pour son premier essai. Haku n’est pas dupe, il sait que c’est juste pour l’encourager mais ça lui fait plaisir quand même. Elle lui propose de recommencer, cette fois en décochant la flèche tout seul et en reprenant la bonne posture. Elle lui conseille de viser plus haut que ce qu’il pense que la flèche fera. Haku n’a franchement aucune idée de comment savoir où la flèche ira mais s’exécute deux fois. Comme tout à l’heure, ils décrochent les flèches et Izumi explique comment s’améliorer.

- Pourquoi toujours trois flèches et pas quatre ou cinq ? demande-t-il comme ça.
- Si tu veux essayer plus, d’accord.

Haku essaye six d’un coup, les muscles de ses bras tremblent sur la fin. Izumi lui montre comment assouplir ses muscles après l’exercice. Haku est étonné de voir la leçon finir si vite mais le soleil décline après tout.

- Alors, ça te plaît ? Tu veux venir encore ?

Si Haku avait encore des appréhensions cette nuit, elles se sont estompées en passant plus de temps avec cette phytos au grand sourire. Il trémousse ses épaules involontairement, cherche ses mots, sa timidité refaisant surface. Il secoue positivement la tête.

- Bien. Viens plus tôt la prochaine fois. Et je te taillerai un arc pour ne pas embêter Kazuo.
- En fait… Je dors à ce moment-là…


Et voilà, au premier obstacle c’est fini. Elle ne voudra pas lui enseigner sur un temps si court. Haku sent qu’il doit expliquer davantage mais ses mots perdent un peu de leur force.

- Je dors le jour et je vis la nuit.
- Ah bon, c’est curieux. Mais ce n’est pas grave ! Tu pourras utiliser le matériel pour toi tant que tu le ranges correctement à la fin.


C’est tout ? Elle l’accepte sans poser de questions ?! Ça doit être parce qu’elle préfère chasser par elle-même et raffole de la viande plus que les autres phytos ou les anemös ayant un totem non-carnivore.

Kazuo lui a des yeux comme des soucoupes. Il comprend pourquoi il ne voit quasiment plus l’autre depuis quelques années alors qu’ils ne s’évitaient pas.

- Alors reviens nous voir dans trois jours, on ne change pas de lieux cette fois.

Haku vient aux leçons avec assiduité même s’il loupe le début. Il partage la nouvelle aux anciens et la fait parvenir à ses parents postés quelque part dans l’orée de la forêt. Le temps accordé par Izumi est remerciée par du troc et des intentions.
Elle lui fournit son premier arc, fait en if, assez simple et droit et lui explique comment tailler ses propres flèches. Elle lui montre aussi comment elle inhibe ses flèches noires de leur substance si particulière. Elle frotte longuement une de ses flèches dans ses cheveux. Au bout d’un moment qui semble une éternité, elle ressort la flèche noircie. Elle lui révèle qu’elle ne peut le faire qu’une fois par jour et qu’une telle fréquence l’épuise.
Les premiers mois, Kazuo est assez sympathique, ravi de lorgner de haut l’autre élève. Ils discutent bien entre eux mais ne se lient pas plus d’amitié qu’auparavant. Hormis l’arc, ils n’ont pas vraiment de points communs. Kazuo prend bientôt ombrage des progrès de Haku. Leur rivalité ne plaît pas à ce dernier qui n’ose plus montrer librement ses performances qu’à Izumi.
La phytos est assez unique en son genre et peut-être que sans elle, Haku ne serait jamais mis à l’arc.
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MessageSujet: Re: Souvenirs forestiers   Souvenirs forestiers EmptyDim 19 Mar - 22:48

Les premières conséquences de la guerre

Les nouvelles de la démobilisation des armées hybrids parvinrent au village de la famille des Yasu. Les guerriers et guérisseurs du village furent accueillis à leur foyer. Le village prétexta de l’événement pour faire un banquet pour ne pas laisser de côté ceux dont la famille n’était pas revenue. Aiko, Tsukiko et Hayato Yasu apparurent, ils portaient des bandages mais semblaient aller bien.

Haku n’était pas parti avec eux en raison d’une blessure faite le plus bêtement et le plus gratuitement du monde juste avant la mobilisation militaire des plus jeunes. En dépit de la parfaite synchronisation sa blessure à la cheville n’avait rien eu d’intentionnelle, l’accident avait été assez bête. Ça durait depuis plus de trois mois déjà et ça l’agaçait depuis longtemps, il avait hâte de reprendre pleinement ses promenades nocturnes et son entretien physique. Mais il avait surtout hâte de revoir ses amis, l’état dans lequel se trouveraient les rescapés du conflit l’inquiétait et il savait déjà que Hibiki et Sora, tous deux de sa génération, étaient morts près d’Anathorey. Chibi était impatient aussi mais pas pour les même raisons. La fratrie prit son mal en patience et l’attente arriva enfin à son terme.

La sœur salua ses frères, la mère embrassa ses fils sur la joue et le père fit une sorte d’accolade à chacun. L’aîné les salua avec gêne tandis que Chibi, le benjamin de douze ans révolus, les accueillit trop enthousiaste pour remarquer l’abattement général.

- On est heureux de vous revoir, fit leur mère, comment va ta cheville ?
- Ça va, je pourrais me passer de béquille mais la doyenne insiste pour que je la garde. Et vous, comment ça va ? demanda-t-il en désignant le bandage sur le bras de sa mère.
- Il n’y paraîtra bientôt plus rien ! répondit-elle avec un clin d’œil.

Après s’être rassurés sur la santé de toute la famille, ils les aidèrent à défaire leurs bagages. Le banquet du retour arriva et Haku hésitait à laisser sa famille pour rejoindre son ami Kenta qui était aussi revenu de l’extérieur, mais sans sa mère. L’anemös fut excusé par ses parents pour aller le voir. Il le chercha chez lui sans succès ; n’y trouvant que le père de ce dernier puis alla à leur repère favori, celui où Haku dormait la journée. Il trouva Kenta, l’air absent, le menton dans ses mains marquées de nouvelles cicatrisations, et se risqua à placer ses mots avec plus d’entrain pour équilibrer l’ambiance.

- Kenta, je suis content de te voir.
- Moi aussi…


Le silence menaça aussitôt de s’installer… Le phytös avait tourné son regard vers Haku et semblait plus triste que son ami ne l’avait jamais vu.

- Tu sais ce qui serait bien ? Ce serait une soirée crêpes avec Takumi, rien que tous les trois.
- Non… Il doit être en train de profiter de sa famille. Ma mère, Hibiki, Sora et même ce fanfaron de Kazuo sont morts... Haku ! Je suis content que tu n’y est pas été.


C’était une sensation horrible de sentir son meilleur ami, d’ordinaire si solide, pleurer sur son épaule. Il le laissa s’épancher un peu, tentant parfois de glisser des paroles d’encouragement. Bon sang, ce qu’il était nul en réconfort !

- Je hais ces üniks pour ce qu’ils ont fait ! Tous ces morts, ce sont eux ! Réussit-il à articuler.

Kenta se laissait aller à de vaines vagues de colère et de frustration. Rien de ce que Haku pourrait dire n’arrangera la situation. Son ami allait au plus mal, le gros du chagrin qui le tourmentait s’exprimait enfin.

Une nouvelle routine s’installa. Désormais Haku était assuré de manger avec sa famille au grand complet le soir. Il occupait le reste de la soirée et la nuit comme autrefois. L’agitation diurne dans la maison dérangeant désormais trop son sommeil, le jour il préférait découcher pour aller dormir dans sa caverne à l’écart des allées principales du village.

L’absence de son père lui avaient fait oublié combien son père méprisait ce qui venait de lui. Et pendant leurs quelques échanges superficiels, il lui semblait qu’aucun de ses commentaires n’étaient positifs. Où traînes-tu la nuit ? Tu ne peux pas t’activer le jour comme tout le monde ? C’est bizarre comme façon de vivre. - Tu n’as pas d’autres vêtements à porter ? - Arrête de balancer ta science, ça ne sert à rien ! - Quand tu auras vécu, là tu pourras l’ouvrir. - N’écoute pas ces vieux croulants, ils te font croire n’importe quoi. - Pourquoi tu n’invites jamais tes amis ? Ah, lui... Tu n’as pas encore trouvé mieux ?
En fait, il jugeait de manière général tout avec beaucoup de préjugés – pas que son fils – et ça participait à annihiler toute sympathie pour lui. Le sujet qui remportait la palme du rébarbatif était celui des üniks et des qantiks qu’il fallait détruire pour Mère Nature. Individus que Haku n’avait jamais vu. La guerre avait fait des ravages et bien que la famille Yasu en soit plutôt épargnée, des amis de Haku avaient perdu des proches, Kenta en premier. Un soir, il eut l’erreur de tenter une discussion avec son père là-dessus.

- Ne peut-on pas trouver une trêve pour arrêter la guerre ?
- Les chamans ne veulent pas et ils ont bien raison. Nos ambassadeurs seraient retenus en otage ou tués par ces üniks sans scrupules.
- Mais sur quoi te bases-tu pour dire ça ? Il doit bien y avoir une action à tenter. Nous sommes à force égale, ils doivent aus…
- Je le sais parce que j’ai passé des années à les voir détruire ce qu’ils ne peuvent obtenir. Des ruses, des coups bas, des sacrifices de leur chair à canon !
- … Mais ce sont leurs guerriers, il doit bien y avoir des gens raisonnables pour…
- Des gens raisonnables ? Ils pillent la forêt, ils tuent les animaux et écrasent les plantes.
- C’est peut-être parce qu’ils ne savent pas.
- Oh si ils savent. Ils font juste semblant d’ignorer. Ils doivent payer pour les dommages qu’ils ont causé.
- Mais la guerre dure depuis trop longtemps, il doit bien y avoir d’autres moyens pour qu’ils cessent de piller la forêt.
- Tu ne sais pas de quoi tu parles. Les üniks sont bouffis d’orgueil et d’avarice.
- N’empêche que les tuer n’est pas la meilleure solution !
- Les épargner ne marche pas non plus. Les neutraliser est l’unique solution raisonnable si tu as le cœur à le faire !


Ne pouvant faire peser ses arguments, Haku cessa de revenir là-dessus. Il osa répliquer de temps à temps quand il estimait que son père était agaçant. Sa mère ne pensait pas à ses choses. Sa philosophie était de soutenir les chamans et de ne pas contrarier l’union du peuple de la forêt. Si elle devait mener une nouvelle fois la guerre, elle le ferait, si elle devait mener la paix, elle le ferait aussi. Sa sœur et son petit frère se calaient sur leur mère, Haku était le seul à penser différemment.
Ces monstres de Mère Nature, jamais Haku ne les avait vus. Il était curieux de savoir, de connaître le monde de leur point de vu mais cela consistait à quitter la forêt. Non que cela lui fasse peur mais les temps n’étaient plus propices et il se devait d’être armé contre toute éventualité. Il n’était pas mauvais à l’arc et la discrétion mais cela suffirait-il ? Quand serait-il assez fort pour survivre à l’extérieur du sanctuaire de Mère Nature ? Qui de son père ou lui avait raison ?

☼ ☼ ☼

Le soir suivant, Haku se tenait devant le local des Yasu sous les deux lunes nocturnes. Après le repas, son paternel lui avait demandé de venir le voir et bien que ça ne l’enchantait pas, il revint chez lui après être passé voir Kenta et avoir repris son entraînement suite au retour de l’instructeur du village. Qu’est-ce que son père lui voulait pour le prendre à part ? Haku imaginait le pire bien qu’il n’ait à sa connaissance rien fait pour ça.

Le local, dissimulé dans la végétation des arbres comme de coutume pour les hybrids, abritait les outils de la famille, en particulier les dagues d’entraînement et de combat et exceptionnellement l’arc de Haku. Les parents Yasu respectaient profondément leur art martial qui consistait à repousser et blesser l’adversaire au corps à corps, les coups étaient vifs et écrasants, les frappes chirurgicales. Très tôt, ils enseignèrent les bases à leurs enfants Aiko et Haku. Aussi doués pratiquant qu’ils soient, les parents Yasu ne réussirent pas à transmettre leur savoir-faire à leur progéniture comme leur maître l’avait fait pour eux – ce dernier était mort depuis longtemps.

Le jeune hybrid entendit un bruit dans le local, son père sans doute ; il entra et trouva celui qu’il cherchait, l’air plus solennel encore que d’habitude. Il se tourna vers lui avant de parler.

- Je voulais te parler en privé. Aiko s’est bien battu sur le champs de bataille, elle s’est montrée digne...
Je suis censé en déduire quoi ? Que je suis indigne ?
- Et toi, si des unïks t’attaquaient, saurais-tu te défendre ?
Je ne suis pas naïf à ce point, je sais que ça peut arriver. Haku hocha de la tête.
- Un arc, c’est bien mais si tu te faisais surprendre avant de pouvoir tirer ?

L’apprenti éclaireur aurait eu envie de répliquer que le premier prévenu d’une embuscade c’était lui mais il n’eut pas le courage de le démentir. Après tout, personne n’est infaillible, ça pouvait bien lui arriver une fois. Hayato sortit deux dagues à poignée blanche.

- Laisse ton arc de côté, prends ces dagues-ci. Elles sont plus légères, ça devrait convenir à tes petits bras.

Son père les avait depuis le début mais Haku ne pensait pas qu’elles lui étaient destinées. C’était trop brusque, il ne voulait pas l’annoncer comme ça. Après ces tentatives d’apprentissage ratées, Haku avait effectivement fait de l’arc son arme de prédilection. Tenir en respect l’adversaire avant même d’aller au contact lui suffisait jusqu’alors. Pendant la première mobilisation de ses parents, Haku avait tout de même cherché un professeur pour mieux lui expliquer les rudiments de l’arme dans l’optique de mieux comprendre ses parents – une idée qui avait germé toute seule. Il trouva son pédagogue à un village assez éloigné, il avait été inespéré d’en trouver un assez vieux pour ne pas être mobilisé. Ce dernier était loin d’être aussi fort que ses parents mais quelle importance tant qu’il était capable de transmettre les bases à autrui ? Le caractère prudent de Haku s’accordait naturellement mal aux exigences du corps à corps. Il lui fallu beaucoup de volonté pour pratiquer cette arme à la mentalité si éloignée de la sienne.

- Montre-moi ce que tu sais faire face à un ennemi.
- Je ne veux pas
, fit Haku avec conviction.
- Tu crois que nous l’avons voulu ? Tu crois que les unïks se posent la question ?
- Je suis sûr que si. Et je ne veux pas faire pareil.


Le regard brûlant de son père lui fit tellement peur sur le coup que Haku recula d’un pas.

- Prends ces armes et défends-toi tout de suite ! D’accord !?

Haku devait céder s’il ne voulait pas que son père entre dans une fureur noire et fasse quelque chose qui lui coûte cher. Il s’approcha la tête basse et prit les dagues d’entraînement puis sortit du local. Hayato sortit à son tour avec sa lanterne pour lui offrir assez de visibilité.

- À toi, l’honneur, fils.

Le fils fit le tour de son père, cherchant le meilleur moment pour frapper bien et en finir avec cette histoire. Il tenta une feinte, recula, reparti à l’assaut. Son père répliqua, se repositionna en défense. Leurs lames s’entrechoquèrent parfois rapidement, parfois ils se tinrent debout sans se toucher. Hayato restait évidemment maître de la situation, ne manquant pas de souligner chaque occasion pour lui de tuer virtuellement son adversaire. Son fils en était aux premiers balbutiements, il était loin d’avoir toute la ruse et la virtuosité d’exécution d’Hayato. Celui-ci se laissa endormir et tandis que Haku intensifia ses coups. Il y avait une certaine imprévisibilité dans ses gestes et ses combinaisons. Hayato repoussa une dague de Haku qui aurait pu toucher une partie vitale si Haku avait voulu et si sa lame était aiguisée. Le père vit rouge à cet instant, il ne pouvait pas se faire surprendre par un novice. D’où lui est venu ce savoir ? Alors que je m’étais tant efforcé de lui faire rentrer dans le crâne des coups plus basiques que ça ? Il tendit prestement un coup vers le cou et l’épaule de son fils, que ce dernier esquiva de peu. La lame entailla la manche de sa tunique. Il recula, sortant de la zone de combat, réalisant que cet échange échappait au contrôle de son père. C’en était déjà assez, le fils déposa ses armes sur le sol.

- Tu as eu ce que tu voulais, arrête !
- Tu es doué pour esquiver mais ça ne suffit pas !
- Arrête, tu veux devenir pire qu’eux !


Hayato n’apprécia pas et reprit le combat où il s’en était arrêté. Haku recula, évitant le plus possible la confrontation. Son père était-il devenu fou furieux ? Il n’allait quand même pas s’en prendre à son fils désarmé ! Haku grimpa prestement à un arbre des alentours. Ça allait bien obliger son père à lâcher ses armes s’il voulait grimper et atteindre son fils. Ou à utiliser son don.

- Tu vois, je peux échapper aux unïks de cette façon.
- Bravo, très astucieux
, déclara sa mère, Tsukiko.

Elle avait surgit de cette façon. Haku était tellement pris par sa confrontation avec son père qu’il ne l’avait pas sentit venir. Hayato quitta sa posture de combat et reprit contenance. Haku était soulagé mais pas fier pour autant, surtout en voyant la lueur désapprobatrice dans les yeux de sa mère. Est-ce que leurs retrouvailles devaient se passer comme ça ? Tout ça à cause de la guerre...

- Haku, va donc aux termes et passe le bonsoir à Sayuri de ma part.

La colère contenue de sa mère n’était donc pas dirigé contre lui. Il sauta de son perchoir et s'éloigna aussi vite qu’il put. Ses parents se parlèrent, Haku ne voulait pas en entendre davantage.
Haku ne sut jamais vraiment comment son père avait vécu l’anecdote, ni ce que sa mère avait dit à son père. Tous deux ne l’évoquèrent pas et Haku n’osait pas demandé à sa mère.

☼☼☼

Quelques semaines plus tard, sa mère le prit à part à son tour. Elle affichait une mine radieuse et enjouée.

- Voici un cadeau pour toi.

Elle lui mit dans les mains un objet. Il était long et assez large pour qu’il le saisisse avec naturel. Il s’agissait d’un fourreau en cuir noir, un fourreau à couteau. Dessus un symbole y était dessiné, une chouette aux ailes repliées, toute en cercles, un œil représenté par un point et le contour de son bec et de son disque facial esquissé. Mais l’étui n’était pas vide, évidemment. L’anemös sortit la lame de son fourreau, elle était belle et neuve, elle n’avait jamais servi. Haku passa ses doigts sur la poignée, le cuir était doux. Il vérifia ensuite le fil de la lame. Elle était d’une douzaine de centimètres, aiguisée, d’une couleur gris argenté et ornée de la même chouette que sur l’étui, les ailes déployées cette fois. Haku admirait l’objet, tandis que Tsukiko observait l’effet produit pat son cadeau.

- Elle est à toi. Elle te plaît ?
- Voui.
- Un petit bijou a besoin d’être utilisé alors je propose que je t’entraîne trois à quatre fois par lune, qu’en dis-tu ?


Elle dodelina de la tête, ses yeux en amande brillant d’espoir. Haku se serait senti ingrat de refuser une proposition qui rendait sa mère si contente, en particulier après le cadeau. Il se souvenait qu’elle n’était pourtant pas tendre pendant ses tentatives d’initiation d’autrefois, à peine plus pédagogue que son père. Elle était incapable de retenir la force de ses coups, elle donnait toujours le meilleur d’elle dans un combat, fut-il une simulation. Il accepta d’un hochement de tête et d’un sourire gauche.

- Merci.

Elle l’embrasa et lui dit qu’elle avait hâte de leur premier essai. Haku pressa sa mère de reporter au lendemain pour lui laisser le temps. Le temps de quoi ? Haku, à partir de roseau et de laine et de cuir, conçu des lames factices. Sa mère doutait de la solidité des dites-armes d’entraînement. Ils les testèrent donc et il s’avéra qu’elles tinrent le coup, elles étaient plus légères que de vraies lames mais au moins ne coupaient pas. Haku prit une rouste ce soir-là. Il prit l’habitude d’en prendre trois ou quatre fois par cycle lunaire. Il avaient des bleus à chaque fois, tant les mains de Tsukiko était habiles pour toucher leurs cibles. Il ne se plaignit pas des douleurs et prit soin de cacher ses marques à sa mère. Elles disparaissaient heureusement au bout de trois jours. Ses progrès manifestes en la maîtrise de l’arme familiale, Haku n’en parla pas à son père. De temps en temps, il lui prenait l’envie d’admirer la nouvelle lame à la chouette qu’il répugnait à user. Si elle pouvait rester intacte toute l’éternité, ce serait bien.
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Souvenirs forestiers

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