La Croisée des Destins [PV Yyko]

Je suis sur le cul. Je ne m’attendais, pas, mais alors pas à ça du tout. Je suis paumée. Je… AAAH !! CALME TOI. Calme toi. Les questions s’enchaînent dans mon esprit : qui est il ? Pourquoi m’approche-t-il avec autant d’aisance ? Pourquoi m’inspire-t-il confiance sans que je le connaisse ? Pourquoi ? POURQUOI ? CALME J’AI DIT. Bon... c’est quand même assez étrange… Mais, je ne veux pas rater cette occasion. Pour la première fois dans ma vie, j’ai envie d’en savoir plus sur quelqu’un. Il a simplement posé ses yeux sur moi et prononcé quelques mots, et ça a suffi pour me bouleverser…
…
Merde.
Quelle idiote, il est en train d’attendre que je réagisse et je suis là, je le mate, je pars en vrille et STOP !! Dis quelque chose. N’importe quoi. Enfin non, pas n’importe quoi, faut pas le faire fuir non plus. On peut commencer par un truc simple. Ouais, c’est bien ça, un truc simple. Allez, je me lance. C’est parti. Go. On y va…

Bonjour…?

STOP, ça suffit, tais toi. T’as l’air VRAIMENT débile. Non. Non, faut pas s’arrêter là en fait, parce que je passe clairement pour une attardée. Un autre truc. Rattrape le coup. Allez… fais fonctionner tes méninges et trouve un truc gentil, normal et tout à fait prompt au lancement d’une discussion passionnée avec un inconnu. C’est parti. Go. On y va.

Il fait beau, hein ?...

NAN

Je… passais dans le coin...

Mais fais un effort putain !!!! T’as toujours été aussi nulle ou quoi ?... Tout bien réfléchi, c’est possible oui. MAIS. Mais. Ne te laisse pas abattre, poursuis. Tu peux le faire.

Oui, je… euh… courais. Oui, c’est ça, je courais et puis-

Il pose son doigt sur mes lèvres.

Shh… Je ne voulais pas t’effrayer...

Moi ? Effrayée ? HA. HAHA. HAHAHAAA- Non, je suis juste cramoisie, les joues brûlantes. J’essaie d’aligner quelques mots mais je n’émets que quelques balbutiements.

Je- euh.. je … non ? Euh… voilà..?

Il n’a pas compris ce que j’ai dit. Il tire une tête bizarre. Bon, calmons le jeu. J’ai un timide mouvement de recul et baisse les yeux tout en lui murmurant ces mots :

Je… n’ai pas vraiment peur en fait..E-essayons de reprendre cette… rencontre normalement, non ? J’ai peut être vu quelque chose que je n’aurais pas dû voir..? Dans tous les cas, je suis Ael. Et j’étais vraiment en train de courir dans le coin… et toi ? Qui es tu ?

Je me surprends à réussir à parler aussi longtemps, même si il a peut être eu du mal à me comprendre, je parlais très vite et n’articulais pas… AAH. Prise d’une panique soudaine, je me recroqueville en attendant sa réponse.

Pour une raison qui m'échappe, sa douceur fait taire ma peur. Elle ne me semble pas avoir peur de ce qu’elle a vu mais plutôt peur d’avoir rencontré quelqu’un. Est-elle perdue ?

Yyko… je m’appelle Yyko. Tu sembles être perdue..

Ce début de conversation avec Ael me détend, je ne la vois plus comme un problème désormais. Pourtant elle semble encore troublée par notre rencontre, je me sens gêné par l’ambiance qui règne.

Je ne suis pas perdue, je… “vagabondais” dit elle, le regard fuyant.

Je recule pour lui laisser plus d’espace, et surtout la possibilité de sortir de ce buisson. Elle semble bien jeune pour quelqu’un qui vagabonde seule dans la forêt, surtout que le village le plus proche, autre que le mien, ne doit pas être à quelques minutes de marche. Pourquoi détourne-t-elle le regard ? Je me sens coupable, ce qu’elle a vu de moi l’effraie peut-être finalement. Je ramasse mon katana, je ne souhaite pas être une seconde de plus un problème à ses yeux.

Dans ce cas, Ael, je ne te dérange pas plus longtemps. Je vais… je vais m’en aller.

Je m'exécute, prenant une direction aléatoire. Bien que mon envie de ne plus déranger soit forte, je me déplace d’une manière relativement lente et calme, comme si mon corps entier ne souhaitais pas quitter les lieux, ou même, abandonner une si belle créature. En à peine quelques pas, j’entends derrière moi de petits bruits étouffés. J’ose jeter un léger coup d’oeil par curiosité, mais aussi dans l’espoir qu’elle réagisse.
Sans surprise, elle était toujours là, mais cette fois-ci les larmes aux yeux, genoux au sol et tendant sa main vers moi tout en prononçant faiblement ces quelques mots :

Attends…

Je ravale mon sourire pour me jeter à genoux devant elle, inquiet. Je tend une main chaleureuse pour essuyer quelques larmes.

Je ne comprends pas...
D-désolé… c’est juste que, j’ai du mal à parler, je n’en ai pas l’habitude. Je ne suis pas douée avec les mots, et.. je ne voulais pas te faire fuir...
Ma présence semblait t’importuner.
Non ! J’étais… hm.. Curieuse ?
Curieuse ?
Bien...

Je me relève, lui tendant ma main pour qu’elle m’accompagne, qu’elle accepte nonchalamment.

Les ombres autour de toi. C’était étrange… mais beau ! C’est ça qui me perturbait. Ne t’en vas pas s’il te plait...
Oh...

Quelle surprise, je ne m’attendais pas à ce que quelqu’un apprécie mon Don. Les premières impressions que j’ai eu d’elle semblent justes. Malheureusement, la fatigue se fait sentir. Je ne peux pas rester là, et je ne la connais même pas ! Pourtant, cette aura de confiance qu’elle a su créer avec un simple regard resurgit. Je commence à vouloir la prévenir de mon état, esquissant un geste vers elle, mais mes forces s’évanouissent en un instant. Je m’effondre comme une feuille devant elle, ma tête se pose sur ses pieds, puis …. rien.

Bon, à vrai dire, c’était surtout lui qui m’attirait plus que son pouvoir. Je n’ai cependant pas le temps de laisser mon hésitation se faire remarquer. Il est soudainement pris d’un vertige et, sans crier gare, tombe tel une poupée de chiffon.
…
Qu’est ce que je fais ? Un homme que je connais à peine est évanoui, à mes pieds et.. et… Il faut que je réfléchisse à ce que je dois faire, et vite ! Je… euh… mais POURQUOI il fait ça tout à coup ? Avait il trop chaud ? Son entraînement l’a fatigué ? Non, je devrais l’aider plutôt que de me torturer l’esprit. La journée va atteindre son terme, la lumière filtrée par la haute cime des arbres s’amoindrit peu à peu… ça pourrait devenir dangereux si je ne me trouve pas un abri pour la nuit. Et il devra rentrer à sa demeure pour se protéger aussi… Je ne veux pas qu’il parte, sa présence me réconforte… Pensons y plus tard. Pour commencer… comment va-t-il ? Je me penche sur lui pour m’apercevoir qu’il ne semble être qu’endormi. Je le secoue timidement, en vain. Je tente une claque mais il ne bronche pas non plus. Il est profondément évanoui et je ne vais pas lui démolir la tronche pour le réveiller… Je me démène pour l’installer dans une position plus confortable, et réussis à l’allonger correctement puis à déposer, tandis que je m’assieds en tailleur, sa tête sur mes jambes. Il me faut une solution pour nous mettre en sécurité. Je me mets à scruter son visage inconsciemment. Il dort à poings fermés, et la forêt s’est faite si calme que j’entends sa douce respiration. Les feuilles des arbres bruissent au passage de la légère brise qui me fait alors frémir. Cet instant irréel me semble durer indéfiniment… En fait, il dure même un peu trop longtemps. J’étais tant perdue à découvrir les contours de son joli minois que j’ai totalement oublié de m’occuper du problème imminent !! Il me distrait trop, beaucoup trop… Mais, à nouveau, ce n’est pas le temps d’y penser, il ne me reste qu’un court instant avant qu’il ne fasse nuit noire. Je n’ai plus le temps de me rapprocher des zones habitées ni de chercher un abri… Et je n’ai pas la force de le monter dans un arbre. Et je n’abandonnerai certainement pas une personne suffisamment intrigante pour me faire oublier toute la peur que j’ai envers les miens. Je veillerai cette nuit, dussé-je utiliser la moindre once d’énergie que mon corps possède pour protéger cet homme des dangers de la nuit. Je le déplace à nouveau et l’adosse contre un arbre. Je m’accroupis devant lui, résolue à ne pas fermer l’oeil jusqu’à ce que les premiers rayons du jour ne se montrent.

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